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La gouvernance ESG : du minimum nécessaire à un cadre abouti

Par Rosa Van Den Beemt, Vice-présidente, investissement responsable, BMO Gestion d’actifs

Mark Webster, Directeur général, Ventes de FNB, Investisseurs institutionnels, BMO Gestion d’actifs

 

Qu’ils soient ou non du courant ESG, tous les investisseurs sont d’accord : une bonne gouvernance est indispensable à toute entreprise qui souhaite bien gérer les risques et être capable de saisir des occasions, de même qu’à la création de valeur à long terme pour les investisseurs et les autres parties prenantes. Les bonnes pratiques de gouvernance d’entreprise progressent continuellement en fonction de l’évolution des marchés, des attentes et, de plus en plus, du contexte réglementaire, mais elles dépendent aussi du type de risques importants que doivent gérer les entreprises. Et les risques liés aux questions environnementales et sociales sont de plus en plus complexes et systémiques. Dans certains domaines, comme la cybersécurité ou les changements climatiques, les membres d’un conseil d’administration doivent impérativement posséder des compétences et une expertise spécifiques pour pouvoir exercer une surveillance adéquate de la performance de l’entreprise. La surveillance des risques doit évoluer au rythme des risques eux-mêmes. De plus en plus d’administrateurs le comprennent : en 2020, 45 % des administrateurs sondés par PwC ont déclaré que les facteurs ESG figuraient régulièrement à l’ordre du jour de leurs réunions, comparativement à 34 % en 2019.[1] 

À plus forte raison alors que nous sommes aux prises avec des défis à long terme, comme les conséquences de la pandémie et la transition vers une économie faible en carbone, les gestionnaires de fonds doivent évaluer si les entreprises et leur conseil d’administration sont suffisamment bien outillés pour bâtir un avenir meilleur. Sachant que la tâche n’est pas simple pour les entreprises elles-mêmes, comment les propriétaires d’actifs peuvent-ils intégrer une analyse adéquate à leurs vérifications préalables concernant les gestionnaires de fonds?  

Les enjeux et le minimum nécessaire ne sont pas statiques 

Les facteurs de gouvernance classiques, comme les présentent les fournisseurs de données ESG, peuvent se révéler insuffisants pour évaluer le degré de gouvernance ESG des sociétés émettrices. En effet, la composition et l’indépendance du conseil d’administration restent importantes, mais elles n’indiquent pas si celui-ci a une expertise ESG ni s’il surveille adéquatement la gestion du capital humain. De même, l’alignement de la rémunération des hauts dirigeants avec leur rendement à long terme reste essentiel, mais a-t-on rattaché des incitatifs financiers à la réalisation d’objectifs stratégiques ou ESG, comme des cibles climatiques ou l’amélioration de la diversité de l’effectif, non seulement pour les postes à grande visibilité, mais pour toute l’organisation?  

Une stratégie ESG alignée sur la stratégie d’affaires comprend une surveillance des éléments suivants par des membres compétents et expérimentés du conseil et l’intégration de ces éléments au cadre ESG : 1) la stratégie et l’affectation du capital; 2) la communication de l’information et la transparence; 3) l’évaluation des risques; 4) la responsabilisation et la rémunération; 5) les relations avec les parties prenantes. Les propriétaires d’actifs doivent s’assurer que les gestionnaires de ces actifs ont évalué adéquatement les compétences des administrateurs et exercé des pressions pour que des changements ou des améliorations soient apportés si un conseil d’administration n’est pas suffisamment robuste.

De plus, c’est grâce à la gérance des gestionnaires de fonds et à leur dialogue avec les conseils d’administration que les pratiques de gouvernance ESG peuvent concrètement progresser. Le dialogue aide les investisseurs à comprendre quels enjeux ESG sont prioritaires pour le conseil et à mesurer le degré d’expertise et de surveillance de ce dernier. Dans le sens inverse, le dialogue avec les investisseurs peut éclairer les administrateurs sur les priorités de ce groupe de parties prenantes et les aider à prioriser les enjeux ESG en conséquence[2].  

Le pouvoir du vote par procuration 

Le vote par procuration peut être un outil puissant pour susciter le changement, en particulier pour demander une meilleure gouvernance aux niveaux du conseil d’administration et de la direction. La course aux procurations menée chez ExxonMobil plus tôt cette année en fournit un bon exemple. Un petit investisseur activiste a en effet réussi à faire élire au conseil d’administration de la société trois de ses candidats administrateurs ayant une expérience approfondie des questions climatiques afin qu’ils influent sur la décarbonisation des activités de celle-ci, en obtenant le soutien sans précédent de très grands investisseurs institutionnels. [3] De manière plus générale, au cours de la période de vote par procuration de 2021, le nombre de propositions d’actionnaires ESG qui ont reçu l’appui d’actionnaires majoritaires aux États-Unis a augmenté, passant de 21 à 34, dans des dossiers aussi variés que les dépenses politiques, la stratégie de lutte contre les changements climatiques et la diversité et l’inclusion[4]. Au Canada, le vote par procuration a été un moteur de changement au sein du Groupe TMX, où les actionnaires ont voté en faveur d’une résolution concernant l’inclusion des Autochtones et la réconciliation avec les peuples autochtones. Le conseil d’administration et la direction de la société avaient appuyé la résolution[5].  

Les principes directeurs d’un gestionnaire de fonds en matière de gouvernance d’entreprise ainsi que ses politiques de vote en disent beaucoup sur sa conception d’une bonne gouvernance et sur les normes qu’il se fixe pour la surveillance des facteurs ESG. À BMO Gestion mondiale d’actifs, par exemple, nous évaluons les secteurs qui sont les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre et votons contre les administrateurs des sociétés qui n’ont pas encore adopté de stratégies robustes et de mécanismes d’information satisfaisants pour gérer le risque climatique[6]. Dans le cadre de cette évaluation, nous nous penchons sur l’obligation de reddition de comptes du conseil d’administration et sa surveillance de la stratégie climatique de l’entreprise, notamment en ce qui concerne l’affectation du capital, la communication de l’information et l’évaluation des risques. Une politique de vote par procuration transparente peut également expliquer comment un gestionnaire de fonds reçoit globalement les propositions d’actionnaires portant sur des facteurs ESG et peut comprendre un aperçu des questions ESG qu’il appuie habituellement.  

Si un gestionnaire d’actifs publie des rapports périodiques sur la gérance, vous y trouverez des statistiques et des exemples de dialogue avec des directions sur la gouvernance d’entreprise et le vote par procuration; vous pouvez aussi demander au gestionnaire de vous donner des exemples de situations où ses démarches ont eu une incidence positive. Enfin, bien entendu, un gestionnaire de fonds devrait publier ses registres de vote, qui indiqueront notamment ce qui a justifié sa décision, résolution par résolution; il devrait pouvoir indiquer s’il a voté contre des propositions d’actionnaires concernant des facteurs ESG ou s’il s’est abstenu, et fournir des exemples.  

Les mouvements de représentation des intérêts relèvent la barre  

Tandis que les changements auxquels peuvent donner lieu le vote par procuration et le dialogue avec la direction ne touchent qu’une entreprise à la fois, les mouvements de représentation des intérêts peuvent relever la barre pour l’ensemble des sociétés d’un même secteur, d’un même marché ou d’une même bourse. L’étau réglementaire se resserre pour les sociétés nord-américaines, en partie du fait du militantisme des investisseurs. Au moment d’écrire ces lignes, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario étudie des projets de réglementation lui demandant de rendre obligatoire la publication de certaines informations relatives aux facteurs ESG, de la même manière que le réclame aux États-Unis le Taskforce for Climate-related Financial Disclosures (TCFD)[7]. La Securities and Exchange Commission américaine est d’ailleurs sur le point d’imposer la publication d’informations ESG sur la gestion du capital humain, la diversité au sein des conseils d’administration (la diversité ethnique, notamment) et les changements climatiques[8]. Au Canada comme aux États-Unis, les organismes de réglementation donnent suite aux suggestions que leur font des investisseurs et des associations sectorielles dans le cadre de mémoires et ils participent à des tribunes publiques. 

Les vérifications préalables à l’égard d’un gestionnaire de fonds devraient donc comprendre une évaluation des positions militantes du gestionnaire, de ses démarches et des résultats qu’il a obtenus. Ces informations se trouvent généralement dans le rapport annuel sur la gérance; des exemples clairs doivent toutefois être fournis. Les propriétaires d’actifs peuvent également demander les liens vers les mémoires qu’a présentés le gestionnaire. 

 Donner l’exemple 

Idéalement, un gestionnaire de fonds devrait fixer la barre aussi haut pour lui-même que pour les sociétés dans lesquelles il choisit d’investir. Il peut s’agir d’adhérer à des organismes de promotion de la gouvernance, comme la Coalition canadienne pour une bonne gouvernance, le Council of Institutional Investors ou l’International Corporate Governance Network. Il existe également des codes de gérance régionaux et mondiaux qui orientent les pratiques des gestionnaires de fonds et, dans certains cas, les obligent à rendre des comptes.  

Liste de contrôle pour les vérifications préalables :

  • Lignes directrices sur la gouvernance d’entreprise ou politiques de vote par procuration
  • Approche générale et registres de vote sur les propositions d’actionnaires concernant des facteurs ESG
  • Communications sur les résultats obtenus
  • Démarches de défense de l’intérêt public
  • Adhésion à des organismes de promotion de la bonne gouvernance et à des codes mondiaux de gouvernance et de gérance, par exemple les Principes de gérance de la Coalition canadienne pour une bonne gouvernance[9] 

Les investisseurs qui retiennent les services d’un gestionnaire externe doivent s’assurer que leur propre vérification préalable des pratiques de ces partenaires (filtrage, sélection, surveillance) n’est pas moins rigoureuse que celle qu’ils attendent d’eux. Leur propre gouvernance pourra leur éviter des erreurs malheureuses dans le choix des gestionnaires, erreurs qui pourraient poser des risques pour la réputation et entraîner une mauvaise affectation du capital. Savoir quelles vérifications faire pour évaluer le filtrage des risques et le nécessaire suivi de gérance est indispensable pour tous les investisseurs, quels qu’ils soient. 

Cette communication est fournie à titre informatif seulement. Bien que l’information contenue dans le présent document soit jugée fiable, rien ne garantit qu’elle soit exacte ou complète. Ce document ne constitue pas une source de conseils en placement ou en fiscalité, et il ne doit pas être considéré comme tel. Les placements particuliers ou les stratégies de négociation doivent être évalués en fonction de la situation de chaque investisseur. Il est recommandé aux particuliers de demander l’avis de professionnels compétents au sujet d’un placement précis. 

BMO Gestion mondiale d’actifs est une marque de commerce qui englobe BMO Gestion d’actifs inc., BMO Investissements Inc., BMO Asset Management Corp., BMO Asset Management Limited et les sociétés de gestion de placements spécialisées de BMO. 

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Rosa Van Den Beemt, Vice-présidente, investissement responsable, BMO Gestion d’actifs

Rosa van den Beemt est une professionnelle de la mobilisation d’entreprises qui compte plus de six ans d’expérience dans le secteur de l’investissement responsable. Elle a intégré l’équipe Investissement responsable en 2020. Avant de se joindre à BMO Gestion mondiale d’actifs, Mme van den Beemt était cadre supérieure, ESG chez Placements NEI, la division de gestion d’actifs de la société de gestion de patrimoine canadienne Patrimoine Aviso. À ce titre, elle a dirigé le programme de vote par procuration ainsi que diverses initiatives de mobilisation d’entreprises sur des enjeux d’ordre environnemental, social et de gouvernance (ESG). Mme van den Beemt possède une vaste expérience de la gouvernance d’entreprise en Amérique du Nord, notamment de la mobilisation des membres de la direction et du conseil d’administration par rapport aux facteurs ESG. Elle a également siégé au comité de direction de l’Investor Alliance for Human Rights, dont le but est de sensibiliser les investisseurs à leur responsabilité quant au respect des droits de la personne et d’obtenir qu’ils intègrent celle-ci à leurs pratiques. À BMO Gestion mondiale d’actifs, Mme van den Beemt met l’accent sur la mobilisation et les votes du marché canadien, y compris du secteur pétrolier et gazier. Mme van den Beemt est titulaire d’un baccalauréat ès science politique et d’une maîtrise ès sciences en études du développement international de l’Université d’Amsterdam.

Mark Webster, Directeur général, Ventes de FNB, Investisseurs institutionnels

Mark représente l’équipe des FNB BMO dans l’Ouest du Canada. Comptant plus de 30 ans d’expérience dans le secteur des services financiers, il a couvert de nombreuses formes de risques financiers. Ayant commencé sa carrière à titre de courtier d’assurance indemnisation professionnelle, il est devenu vice-président de Minet International Professional Indemnity Ltd. (membre d’AON), menant des analyses de risque pour les huit grands cabinets comptables du monde ainsi que pour d’importants cabinets d’avocats aux États-Unis. Il est responsable de la supervision de l’expansion des FNB dans tout l’Ouest du Canada et assure un soutien aux gestionnaires de portefeuille depuis le Pacifique (Duncan, en Colombie-Britannique) jusqu’à la tête des Grands Lacs (Thunder Bay, en Ontario). Il a travaillé comme conseiller en placements de particuliers à RBC Dominion valeurs mobilières, dans le secteur des fonds d’investissement à First Trust Portfolios, et a occupé plusieurs autres postes dans le secteur des caisses de retraite. Il possède une maîtrise en histoire de la Russie de l’Université McGill, en plus de détenir plusieurs attestations de CSI.

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